Inspiration

Rencontre avec soi pour renconter l'autre :Fabrice Luchini

L’indispensable rencontre avec soi pour rencontrer les autres !

Cet article est une transcription d’un extrait de l’interview de Fabrice Lucchini pour l’émission “à voix nues” de France Culture. Fabrice Lucchini s’exprime sur la nécessité d’une rencontre avec soi-même avant de pouvoir accéder à la rencontre des autres.

L’expérience de la rencontre par Fabrice Lucchini

Je ne vous enseigne pas l‘amour du prochain disait Nietzche mais l’amour du plus lointain. »

Quand Nietzche dit :

« je voudrais que votre prochain vous devienne insupportable pour que vous que vous compreniez qui est votre ami à l’intérieur de vous. »

C’est une mythologie moderne incroyable, il n’y a pas de pensée sérieuse s’il n’y a pas de solitude. Il n’y a pas de pensées même si on adore être ensemble pour frotter nos cervelles et se branler pour se rassurer. Mais notre condition métaphysique, elle est d’être seule.

Enfin, je ne veux pas employer des grands mots.

Qu’est-ce que c’est que cette chose de se retrouver ensemble ?

Il faut se retrouver avec soi, vous ne pensez-pas ?

Moi je pense qu’il vaut mieux se retrouver avec soi parce que vous ne pouvez témoigner de choses passionnantes que si vous êtes rentrés dans votre chaos.

(…)

C’est merveilleux l’autre.

Il n’est pas question de se priver du miracle, comme dit Levinas, de l’autre.

Mais pour être avec l’autre, il faut avoir compris des choses en soi.

Si tu n’as rien compris en toi, si, comme dis Simone Veil, tu n’as rien élucidé, qu’est-ce que tu vas comprendre de l’autre ?

Tu ne comprendras de l’autre que ce que tu as vaguement compris de toi.

Essayons d’être très clair.

Je ne peux jouir de l’autre qu’en ayant de l’empathie, pour avoir de l’empathie il faut que je le comprenne.

Pour que le comprendre, au sens premier (le prendre avec) il faut que je comprenne des choses en moi pour que ce qu’il est résonne en moi.

Et pour que ça résonne en moi comme un , il faut quand même que je m’y sois colleté à ce que je suis (qui est minable, médiocre, chaotique, inconséquent), mais tant que tu n’as pas un début d’élucidation de ce que tu es, qu’est-ce que tu vas recevoir de l’autre?

Tu ne vas rien comprendre de l’autre parce que pour comprendre l’autre et bien il faut avoir compris soi.

Tu n’as de sympathie avec l’autre que ce que tu as accepté de sympathie avec toi. Une véritable sympathie (pas une relation mondaine, ça c’est autre chose, ça c’est une ivresse).

Deleuze disait d’ailleurs, les personnages de Proust sont passionnants ils ne parlent jamais d’eux même, ils n’ont pas cette vulgarité-là.

On a le droit d’être un mondain, on connaît tous des mondains.

C’est une drôle de race les mondains. Ils ont des dîners tous les soirs, ils se branlent, ils disent les mêmes conneries.

Moi aussi, moi je ne suis pas mieux qu’eux. Dire des conneries avec des autres, regarder compléments d’enquête ou faite entrer l’accusé. (…) je ne suis pas mieux qu’un mondain, il a raison. je ne vais pas me mettre à juger.

Ce que je peux dire modestement

C’est que mon affection pour l’autre ne peux pas ne pas dépendre de ce que j’ai accepté d’aimer un peu en moi.

Car si je ne connais rien du tout de moi et si je ne sais pas qui je suis, je vais être dans un tel état d’incertitudes, de non présence, que je ne vais rien voir dans l’autre, car je vais voir dans l’autre qu’une confirmation de moi. Je vais l’utiliser, l’instrumentaliser pour en faire un spectateur et non pas une rencontre.

(…)

« mais moi je ne peux pas vivre sans les autres »

Quand les gens disent « mais moi je ne peux pas vivre sans les autres », mais bien sure, on est tous pareil mais ne dis pas ça. Dis que t’as besoin d’échos de toi et que tu utilises l’autre comme un spectateur. Tu le réduis.

Ce n’est pas un rapport, ça va en sens unique. Tu vas chercher l’autre uniquement pour te confirmer dans ce que tu es et dans ton erreur et tu utilises son soleil pour te chauffer à son erreur.

Donc ne croyais pas que les gens qui disent la phrase banale

« Je ne m’intéresse pas moi, je ne m’intéresse que des autres, c’est la rencontre avec les autres »

Coulions, il n’y a pas de rencontre avec les autres, on aimerait tous ne pas se rencontrer.

Qui sait qui aurait la prétention de penser que son petit moi est praticable, personne.

Qu’est-ce qu’il y a de plus pénible que d’être avec soi-même.

L’homme s’ennuie et l’ignorance lui est attachée depuis sa naissance, disait Claudel.

On s’ennuie, on est mal avec nous, on ne sait pas, on y comprend rien, on est chaotique, contradictoire, on est merdique. C’est un paquet de merde de rencontrer son moi.

En même temps, si tu ne le rencontres pas du tout, tu ne peux pas comprendre beaucoup des autres.

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